L’Union européenne soutient le journalisme engagé et l’innovation médiatique dans le voisinage sud à travers plusieurs concours. 3Q TALKS donne la parole aux lauréats de ces compétitions pour découvrir les coulisses de leur parcours, mettre en lumière l’impact de leur travail et inspirer de nouvelles vocations. Lauréate de la cinquième édition du Prix Lina Ben Mhenni pour la liberté d’expression, Zina Bekri revient sur les motivations qui l’ont poussée à y participer. À travers son enquête consacrée aux victimes des mines à Kasserine, elle donne voix aux oubliés et éclaire des réalités souvent invisibles. Dans cet entretien, elle partage son engagement et sa vision du journalisme comme levier de changement.
J’ai participé au concours du Prix Lina Ben Mhenni pour la liberté d’expression dans le but de contribuer, à ma manière, à la continuité du message porté par la courageuse militante Lina Ben Mhenni. Ce prix signifie énormément pour moi parce qu’il porte le nom de Lina Ben Mhenni, militante et activiste qui a consacré sa vie à la défense de la liberté d’opinion, d’expression et de pensée. Je suis très fière d’avoir remporté le Prix Lina Ben Mhenni dans sa cinquième édition. Ce prix constitue un encouragement fort à poursuivre mon engagement dans les causes humaines et sociales. Il reste aussi un rappel constant que les mots peuvent être à la fois des outils de résistance et des instruments de construction.
À travers mon travail journalistique, je m’efforce de mettre en lumière des questions importantes qui touchent différentes catégories de la société tunisienne, en particulier les groupes marginalisés. Mon objectif est d’aborder des sujets souvent ignorés ou biaisés, contribuant ainsi à élargir la conscience du public et à susciter des débats constructifs autour de ces enjeux. Le journalisme ne se limite pas à la simple transmission d’informations, mais constitue un outil pour changer les mentalités et encourager le dialogue social, en stimulant la pensée critique et la participation aux débats publics. En menant l’enquête pour laquelle j’ai remporté le prix, sur les souffrances des habitants des zones touchées par les mines à Kasserine, j’ai énormément appris, tant sur le plan humain que professionnel. J’ai été profondément marquée par la résilience et le courage de ces familles, qui continuent de vivre et d’élever leurs enfants malgré les dangers quotidiens. Cette expérience m’a surtout rappelé à quel point le journalisme peut jouer un rôle essentiel pour rendre visibles des réalités négligées, alerter sur des enjeux cruciaux, et inciter à une action concrète en faveur des plus vulnérables.
Le conseil que j’aurais aimé recevoir dès mes débuts, c’est que le journalisme n’est pas simplement un métier, mais une mission, porteuse de responsabilité envers la société. Chaque mot peut être un levier de changement, et c’est pourquoi il est essentiel de préserver sa passion et son engagement, même dans les moments les plus difficiles. J’aurais aussi aimé qu’on me dise que les obstacles, comme le manque d’accès à l’information, ne doivent pas être des freins, mais au contraire des moteurs pour persévérer, faire entendre la voix des citoyens et faire émerger la vérité, coûte que coûte.