Depuis qu’elle a quitté la Libye en 2015, Safia a été frappée par les points communs qui unissent les autres Arabes qu’elle a rencontrés. Yéménites, Irakiens ou Libanais, tous partagent des traits et des comportements qui l’ont fascinée et intriguée.

C’est pour satisfaire à cette fascination qu’elle a consacré ses études et ses travaux ultérieurs à la recherche des éléments qui composent l’identité arabe. C’est dans son pays d’origine, la Libye, qu’elle a décidé de se mettre à creuser. « À l’université, il m’arrivait de voir d’autres étudiants écrire des histoires basées sur Los Angeles, New York ou d’autres villes où ils n’avaient jamais mis les pieds. Je voulais faire quelque chose de différent et ancrer mes histoires là où j’ai grandi. Mais j’ai très vite pris conscience que je n’avais que très peu de ressources sur lesquelles m’appuyer ».

Safia a lancé un projet visant à combler cette lacune en matière d’archives et de connaissances historiques. Sard (« récit » en arabe) est une initiative à deux volets comprenant un podcast docu-narratif et un documentaire de format court. Fondés sur un scénario de recherche historique présenté sous la forme d’une fiction, les produits créatifs explorent les aspects sociaux de la vie sous l’occupation italienne et dans la Libye de l’après-indépendance.

« Certaines personnes sont de véritables archives ambulantes et personne ne les connaît ! Lorsque la COVID-19 a frappé, j’ai pris conscience de l’urgence de ce projet, car ces personnes ne seront peut-être plus là longtemps pour raconter leur histoire. Notre histoire ». Elle explique que se plonger dans le passé lui permet d’acquérir la sagesse dont elle a besoin pour construire l’avenir.

Safia a pour ambition de faire de son travail un ouvrage public, une archive ouverte pour les Libyens désireux de connaître leur histoire. « Si cela peut susciter un élan chez d’autres personnes qui se posent des questions similaires, ce serait formidable. Mais j’essaie de ne pas trop penser à la perspective macro. Je veux apporter ma pierre à l’édifice, l’une après l’autre, à mon niveau ».