Henna de Timimoun : un patrimoine algérien en pleine floraison

Juin 19, 2025
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Dans la région de Timimoun en Algérie, le programme JIL-SIYAHA, financé par l’Union européenne, permet à de jeunes entrepreneurs de redonner vie à des savoir-faire ancestraux. Grâce à des formations, un accompagnement personnalisé et des financements, l’UE soutient des femmes locales comme Fatima Zahra Lemaallem pour développer des initiatives ancrées dans la durabilité et la tradition, démontrant comment l’économie circulaire peut transformer à la fois les vies et les paysages.

Un arbre dans le jardin, une graine de changement
Lorsque Fatima Zahra Lemaallem découvre un plant de henné dans le jardin de la maison familiale de son mari à Timimoun, elle y voit bien plus qu’un simple arbuste : elle y voit un avenir. « J’ai essayé d’utiliser les feuilles et j’ai été impressionnée par leur qualité », se souvient-elle. « Mais je me suis aussi rendu compte qu’on utilise du henné tout le temps, mais qu’on l’importe d’Inde… et qu’on y ajoute même des produits chimiques ! » Cette prise de conscience a planté la graine de ce qui deviendra Henna de Timimoun, la première entreprise de production de henné naturel dans la région isolée du Gourara. À partir de seulement 20 plants, Fatima a multiplié les essais pour trouver la méthode de culture adéquate.

« J’ai tout appris toute seule, en faisant des recherches en ligne et en expérimentant dans mon jardin », se souvient la jeune femme de 31 ans. En cinq ans, ses efforts ont porté leurs fruits : plus de 500 arbustes prospèrent aujourd’hui, et sa plantation devrait dépasser les 6 000 pieds prochainement. Mais cette plantation n’est pas qu’un succès agricole, c’est aussi une révolution personnelle. « Au départ, mon mari et moi étions tous les deux au chômage. C’était difficile. Mais il croyait tellement en mon idée qu’il a vendu sa voiture pour m’aider à lancer le projet. » Ce geste de soutien lui a permis d’équiper un petit atelier, de légaliser son activité et de commencer à vendre directement ses produits.

Une coopérative de femmes enracinée dans la tradition
Ce qui n’était qu’un projet domestique s’est transformé en véritable entreprise. Aujourd’hui, la startup de Fatima emploie 12 femmes pendant les saisons de récolte, et 5 femmes à l’année dans son atelier. « La plupart d’entre elles viennent de milieux vulnérables », explique-t-elle. « Il n’y a pas beaucoup d’opportunités à Timimoun, surtout pour les femmes. Je les forme moi-même, pendant deux semaines de travail pratique, et ensuite elles sont prêtes. »

Le henné est récolté trois fois par an, avec un rendement pouvant atteindre cinq quintaux par an. Il est ensuite transformé en poudre à usage cosmétique et bien-être. Henna de Timimoun produit chaque année 30 000 sachets, fabriqués exclusivement à partir d’ingrédients naturels, sans aucun produit chimique. Fatima décrit fièrement sa marque comme « 100 % bio ».

Mais pour elle, il ne s’agit pas seulement d’un projet économique. « Le henné fait partie de notre identité culturelle. Il est présent dans nos mariages, nos fêtes, nos rituels de beauté. Je voulais préserver cela. » Sa startup contribue à protéger l’agriculture oasienne, à promouvoir l’agroécologie et à sauvegarder des traditions régionales menacées d’oubli.

Des racines locales à une reconnaissance nationale
En 2023, Fatima participe au concours « Génération Tourisme » du programme JIL-SIYAHA, après avoir vu une publication sur les réseaux sociaux. Elle remporte la deuxième place dans la catégorie EU4HERITAGE, un tournant pour son entreprise. « Gagner ce prix a tout changé. Mon produit est devenu connu à l’échelle nationale. J’ai gagné en confiance, et j’ai pu développer mon activité », raconte-t-elle.

Grâce au soutien de l’UE, Fatima a bénéficié de formations en développement entrepreneurial, d’un accompagnement personnalisé et de conseils en marketing. « Ils ne se sont pas contentés de me donner de l’argent : ils m’ont appris à bâtir une véritable entreprise. Je suis passée d’une pièce de 12 m² à un atelier de 50 m² équipé professionnellement. »
Le programme JIL-SIYAHA lui a aussi permis d’intégrer un réseau de jeunes entrepreneurs et de mentors. « Je suis toujours en contact avec mon coach et les autres lauréats. On échange des conseils, on se soutient. »

Preuve de son succès, Henna de Timimoun a récemment reçu la visite du nouveau chef de DG MENA de la Commission européenne, M. Stefano Sannino.
Désormais, Fatima voit encore plus grand : elle prévoit d’étendre sa plantation, de développer de nouveaux produits comme des masques pour le visage et des teintures capillaires naturelles, et même de se lancer dans l’export. L’un de ses projets les plus ambitieux est de créer une expérience d’agritourisme, permettant aux visiteurs de récolter le henné, de découvrir le processus de transformation, et de savourer la cuisine et les traditions locales. « Je veux que les gens découvrent la beauté de Timimoun, nos traditions, et ressentent un lien avec notre terre », dit-elle avec fierté.

JIL-SIYAHA est une initiative conjointe de l’Union européenne et du ministère algérien du Tourisme et de l’Artisanat, financée par l’Instrument européen de voisinage. Le programme vise à soutenir l’entrepreneuriat des jeunes dans le tourisme et les chaînes de valeur associées (agriculture, gastronomie, artisanat, etc.). Mis en œuvre dans quatre wilayas pilotes — Timimoun, Djanet, Sétif et Tlemcen — il s’adresse aux jeunes de 18 à 35 ans, avec un accent particulier sur les femmes et les personnes en situation de handicap. En fournissant formation, financement et mentorat, JIL-SIYAHA transforme les idées innovantes en entreprises durables contribuant au développement local et à l’économie circulaire.

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