Jeunes aujourd’hui, pauvres demain ? La protection sociale au centre du premier évènement « Media Connect » au Liban

Mai 31, 2024
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Dans le cadre de sa nouvelle initiative baptisée Media Connect, le programme EU Neighbours South a organisé un évènement au Liban qui a réuni des étudiants en journalisme de trois universités pour discuter de la protection sociale dans le contexte de la crise économique traversée par le pays. Soutenu par la Fondation Maharat, cet évènement a été l’occasion de présenter la nouvelle stratégie nationale de protection sociale, soutenue par l’UE, qui procure des avantages aux groupes vulnérables et aux travailleurs du secteur privé. L’évènement organisé au Liban s’inscrit dans le cadre d’une initiative plus large mené par le programme EU Neighbours South pour faire participer les jeunes journalistes de la région méditerranéenne. Des évènements similaires sont prévus au Maroc, en Jordanie et en Libye.

Une vingtaine d’étudiants en journalisme de trois universités libanaises (l’Université Notre-Dame, l’Université Antonine et l’Université arabe) ont participé au premier évènement « Media Connect » du programme EU Neighbours South au Liban. Le thème évocateur de cette rencontre, « Jeunes aujourd’hui, pauvres demain ? », visait à attirer l’attention sur l’urgence de la question de la protection sociale au Liban.

Organisé avec le soutien de la Fondation Maharat, le premier évènement « Media Connect » au Liban a rassemblé des étudiants dans les domaines des médias et de la communication, des journalistes en herbe, ainsi que des représentants de l’UE et de projets financés par l’UE autour du thème de la protection sociale. Cette question complexe s’avère cruciale étant donné la situation actuelle au Liban et le manque de services sociaux pour la population. L’évènement a été l’occasion pour les étudiants de se familiariser avec les différents aspects de la protection sociale et la nouvelle stratégie de protection sociale du Liban, qui a été soutenue par l’UE et adoptée par le gouvernement libanais au début de l’année.

Une nouvelle stratégie soutenue par l’UE : la protection sociale inclusive 

Dans son intervention, Alessandra Viezzer, directrice de la coopération au sein de la délégation de l’Union européenne, a souligné l’importance de l’adoption de la stratégie nationale de sécurité sociale. Elle a fait savoir que, compte tenu de la crise économique, elle compte sur l’intervention du Fonds monétaire international pour élaborer un plan de relance. Elle a également insisté sur la nécessité de prendre les mesures qui s’imposent pour restructurer le système bancaire et relancer l’économie.

Mme Viezzer a également appelé les Libanais à s’acquitter de leurs impôts, « car cela est nécessaire pour maintenir les institutions de l’État », a-t-elle déclaré, tout en exhortant les jeunes à se rendre aux urnes s’ils veulent voir de réels changements.

Citant une récente étude de la Banque mondiale sur la pauvreté au Liban, elle a noté qu’« un Libanais sur trois vit dans la pauvreté, tandis que la classe moyenne représente 23 % de la population, le Liban étant un pays où les inégalités sont de plus en plus criantes ».

Sobhiya Najjar, une journaliste et chercheuse qui a participé à l’élaboration de la stratégie nationale de protection sociale, a donné un aperçu de la situation et des nouvelles mesures en matière de sécurité sociale qui devraient être prises à l’issue de la crise traversée par le pays. En fait, avant la crise, seuls les fonctionnaires bénéficiaient de plans de protection sociale satisfaisants, notamment en ce qui concerne les prestations de santé et de retraite. La nouvelle stratégie inclurait le secteur privé et les groupes les plus vulnérables, notamment les personnes handicapées et les travailleurs migrants. Elle comprendrait également plusieurs nouveaux volets, tels que la maladie, le chômage, la vieillesse, les accidents, les prestations de maternité pour les familles, l’invalidité et les pensions de survivants.

Parmi les autres priorités figure un plan d’aide aux citoyens les plus vulnérables, lancé à la suite de la crise de 2019 et financé par l’Union européenne. Celui-ci est mis en œuvre conjointement avec le Programme alimentaire mondial et le ministère libanais des Affaires sociales et soutient 75 000 foyers libanais parmi les plus vulnérables en octroyant à chaque membre d’une famille 20 dollars par mois.

La voix des jeunes au centre de l’attention : les points de vue de journalistes en herbe

La jeunesse libanaise, qui vit dans un pays durement frappé par une crise économique sans précédent, a mûri face à l’adversité subie au cours des cinq dernières années. Les questions posées par les jeunes aux intervenants venus parler de la pauvreté, de la citoyenneté, du rôle de l’État et de la protection sociale, étaient dignes de journalistes chevronnés et reflétaient un réel intérêt pour l’avenir de leur pays et les répercussions que peut avoir la stratégie de protection sociale sur leur propre vie.

Les participants ont posé un certain nombre de questions sur les mécanismes de contrôle soutenant l’administration libanaise, l’aide future, les projets européens mis en œuvre au Liban, la lutte active contre le népotisme et la corruption, ainsi que la présence de réfugiés syriens et le soutien qui leur est apporté.

Riwa Haidar, une étudiante en journalisme de 21 ans, a souligné qu’« il est important que les donateurs contrôlent l’argent versé à l’État libanais ». Riwa, qui souhaiterait rester au Liban, est bien consciente qu’il est de plus en plus difficile de vivre dans un pays qui n’a pas grand-chose à offrir à ses citoyens. « Si je reste, je veux pouvoir vivre dignement. Je ne veux pas être contrainte de mendier auprès d’un parti politique pour pouvoir manger à ma faim ou aller à l’hôpital pour me faire soigner », a-t-elle déclaré.

Jana el Taboun, qui suit son premier semestre de cours de journalisme, a évoqué le problème de toutes les familles de son quartier qui ont été plongées dans la pauvreté du jour au lendemain à cause de la dévaluation de la monnaie libanaise. La jeune femme a néanmoins estimé que « la stratégie de protection sociale adoptée en début d’année peut permettre aux Libanais d’être mieux ancrés dans leur pays ».

Ribal Abou Ali, un étudiant en journalisme âgé de 20 ans, a quant à lui déclaré : « J’aime le Liban et je veux y rester. C’est pourquoi il est nécessaire que les choses changent à l’avenir, pour moi et pour ma famille.  Une politique de sécurité sociale adéquate devrait faire partie de ces changements ». 

 

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