Marrakech : Entrepreneurs sociaux… moments d’échange et de réflexion.

Janvier 29, 2018
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Pendant quatre jours, à Marrakech, s’est tenu un bootcamp de l’entreprenariat social, auquel ont participé des jeunes de Tunisie, d’Algérie et du Maroc, avec l’encadrement d’experts internationaux. Ce bootcamp est le troisième après deux autres tenus en Tunisie et en Algérie. Il est organisé dans le cadre du programme SEED Euro-Med, un programme d’échange financé par l’Union européenne pour soutenir les entrepreneurs sociaux à travers l’apprentissage mutuel et le dialogue interculturel.

Le programme SEED Euro-Med, mis en œuvre par cinq ONGs installées à Londres, Paris, Alger, Tunis et Rabat, offre aux nouveaux entrepreneurs la possibilité d’acquérir ou d’échanger des connaissances et des idées entrepreneuriales avec un entrepreneur social expérimenté, et auprès duquel ils séjournent d’un à trois mois. Ils sont indemnisés d’un montant mensuel variant de 850 à 1100 euros, plus la prise en charge des billets d’avions.

Le programme a pu organiser des opérations d’échange entre les entrepreneurs sociaux aussi bien au Maroc qu’en Algérie, en Tunisie, en Italie, en Grèce ou en Grande-Bretagne.

Les participants au bootcamp de Marrakech sont de nouveaux entrepreneurs sociaux. D’autres ont déjà développé une idée d’entreprise. L’ensemble des participants étaient présents afin d’approfondir leurs connaissances et leur savoir-faire sur l’entreprise sociale.

Cette activité a fourni aux participants l’occasion de se familiariser avec le processus de la création et de la gestion de l’entreprise sociale. Ce processus se compose de dix étapes : de l’identification du problème jusqu’à la définition puis la mise en place d’une solution durable sous la forme d’une entreprise sociale.

Durant le bootcamp, ce thème a fait l’objet de longues discussions entre les participants et les experts présents. Au cours de l’une des pauses, les participants échangent avec Vera Borsboom, la directrice du programme à Londres. Selon elle, « l’essentiel pour l’entreprise sociale n’est pas le profit mais le fait de participer à traiter un problème sociétal. Cependant, pour réaliser cela et pour garantir la pérennité, l’entreprise sociale se doit de savoir comment réaliser aussi des profits. » Et pour expliquer davantage : « Il faut maximiser le volet social par rapport au volet commercial », ajoute Vera.

Najib, un participant de Tunisie n’a pas d’entreprise au sens juridique du terme mais son expérience personnelle l’a poussé à venir au bootcamp afin d’apprendre comment créer et gérer avec succès sa future entreprise sociale. Actuellement Najib travaille en collaboration avec cinq femmes au sein d’un groupe qui se fait appeler ‘Tilli Tanit’ (ce qui signifie ‘L’ombre de la reine’ en amazigh) et qui produit des vêtements traditionnels avec de la broderie en fil de soie ou de d’argent.

Avec beaucoup de passion et d’émotions vives, Najib trace le parcours qui l’a conduit à créer le groupe ‘Tilli Tanit’ : « Au travail de la mer, mon père avait joint l’agriculture dans la région d’El Mehdia sur la côte tunisienne. Il désirait que je partage avec lui son métier. Mais moi, j’étais passionné, depuis mon enfance, par l’art et le travail de la broderie de ma mère », nous raconte Najib. Ce qui a mis son père en colère. Apres avoir réussi son baccalauréat, il a étudié pendant trois ans, dans un institut de textile.

« Apres cela, la révolution de 2011 a éclaté et les portes se sont ouvertes », dit Najib avec fierté. Najib a rallié la capitale et a vu de près le mouvement social. Apres cela, il retourne de nouveau à El Mehdia où il a rencontré les cinq brodeuses.

« Après quatre jours au bootcamp, j’ai maintenant une vision claire du processus à suivre pour créer et gérer mon entreprise sociale avec mes cinq partenaires », conclut Najib avec satisfaction.

Kamal, le coordinateur du programme en Algérie, a accumulé une expérience dans l’action avec les entrepreneurs sociaux. Il met l’accent sur l’importance du programme SEED Euro-Med. « Un tel projet contribue à l’appui de la sécurité et de la stabilité dans la région du Maghreb. L’entreprise sociale constitue un moyen efficace pour intégrer des femmes dans des situations difficiles, des handicapés, des personnes âgées et des enfants… », observe Kamal.

« Le bootcamp de Marrakech, renchérit Kamal, nous a permis de consolider ce que nous avons fait durant trois ans dans l’encadrement et l’accompagnement des nouveaux entrepreneurs sociaux. »

Un autre participant, Younes, un jeune ingénieur en génie civil, ambitionne de créer sa propre entreprise sociale. Il possède déjà une expérience au sein d’une association à vocation sociale.

« Mon histoire commence alors que j’étais étudiant à l’école des ingénieurs à Casablanca, j’ai élaboré un concept pour attaquer l’habitat insalubre », nous dit Younes. « Moi et l’un de mes amis avons essayé de concrétiser notre concept de construire à 90% à partir de l’argile et à 10% du ciment. Nos tentatives ont échoué, mais après de gros efforts nous avons réussi à réaliser deux constructions. Nous pensons maintenant à créer notre entreprise. Le bootcamp de Marrakech m’a aidé à maîtriser le processus de la création d’une entreprise sociale », a conclu Younes.

A la fin du bootcamp, les participants ont présenté leurs projets devant les experts. Ils sont conscients des difficultés auxquelles ils devront faire face, mais armés pour s’engager dans l’aventure. Ces mêmes difficultés que « l’on peut dépasser si les efforts des pouvoirs publics, des élus, des acteurs économiques, et de la société civile se conjuguaient » selon Wiaam, la coordinatrice du projet au Maroc.

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