Huda et Aziza ont appris à se débrouiller en électricité et à entretenir leur maison dans le cadre d’un programme de renforcement des capacités destiné aux femmes syriennes et jordaniennes. Elles mettent aujourd’hui à profit leurs nouvelles connaissances pour contribuer fièrement aux revenus de leur famille, tout en retrouvant un sens à leur vie.
L’une est une Syrienne, mère de deux enfants, elle vit à Deir Alla, dans le nord de la Jordanie ; l’autre est une Jordanienne de 26 ans, elle habite dans le sud de la Jordanie et est fraîchement diplômée d’une licence en chimie. Bien que rien ne semble les unir, Huda et Aziza ont toutes deux vécu des expériences similaires qui ont changé leur vie il y a deux ans, alors qu’elles participaient à un programme de renforcement des capacités financé par l’UE.
Ce que nous apprenons, nous pouvons l’enseigner : lorsque les femmes s’entraident
« “Lorsque je me suis installée en Jordanie il y a près de dix ans, je m’attendais à ce que les choses soient très dures, je me préparais à devoir affronter de nombreuses difficultés », se souvient Huda, qui a fui Damas, en Syrie, avec son mari et ses deux enfants lorsque la guerre a éclaté.
Bien loin de là, Huda se souvient d’avoir été accueillie à bras ouverts. « Les gens nous ont accueillis et acceptés, nous nous sommes sentis en sécurité parmi eux ». Plus encore, elle dit avoir trouvé un nouveau but dans la vie et s’être autorisée à rêver d’un avenir plus radieux.
Alors que son mari travaille dans l’agriculture et que ses enfants vont à l’école, Huda a décidé de s’inscrire à une formation à l’entretien ménager proposée aux réfugiées syriennes de sa région.
Bien qu’elle n’ait jamais envisagé de travailler dans le domaine de la plomberie et de l’électricité auparavant, Huda pense que les choses sont en train de changer. « La perception des femmes au travail est en train de changer. Si une femme sort [de la maison] pour travailler, elle encouragera les autres, et comme nous avons maintenant un bon nombre de femmes qui travaillent, les choses vont évoluer », affirme Huda.
Comme Huda, plus de 3 000 femmes syriennes et jordaniennes ont participé à des formations sur l’employabilité et les compétences professionnelles en Jordanie, dans le cadre d’un partenariat entre l’Union européenne et l’Initiative Féministe EuroMed. Ce partenariat vise à améliorer les moyens de subsistance des réfugiées syriennes et des femmes des communautés locales en Jordanie, au Liban et en Irak. Il vise également à contribuer à éradiquer les obstacles pratiques, sociaux, culturels et juridiques qui se dressent sur la route de l’emploi.
C’est cette indépendance et cette liberté de choix que cette maman syrienne recherchait lorsqu’elle s’est inscrite au cours de 60 jours. « La liberté, c’est que je peux quitter la maison pour faire quelque chose d’utile, parce que j’en tire profit et que cela aide aussi d’autres personnes ».
Elle estime que la formation leur a permis, à elle et à ses pairs, d’acquérir des compétences professionnelles essentielles, qui leur seront utiles dans n’importe quel emploi ou entreprise à l’avenir. « Nous avons appris à travailler en équipe, à coopérer et à nous respecter mutuellement ». Et, grâce à ces nouvelles compétences, Huda pense que, étape par étape, elles pourront se développer et « avoir un véritable projet dans le cadre duquel nous pourrions également former d’autres femmes et leur donner des cours ».
« Ce que nous apprenons, nous pouvons l’enseigner », conclut-elle avec enthousiasme.
(Re)découvrir sa valeur par le travail
Comme Huda, Aziza, 26 ans, a retrouvé sa confiance en elle en s’inscrivant à une formation à la maintenance financée par l’UE et proposée par le centre Oasis de Karak, dans le sud de la Jordanie.
« J’ai cherché un emploi pendant plus de deux ans après avoir obtenu mon diplôme. Mais comme beaucoup de gens dans mon domaine, la chimie, je n’ai rien trouvé ».
Par ennui, elle s’est inscrite à plusieurs formations avec un ami, « juste pour s’amuser et passer le temps ». Jusqu’au jour où un programme a vraiment attiré son attention : une formation de trois mois « argent contre travail » dans le domaine de l’électricité et de la maintenance dispensée par un ingénieur.
« Le projet ne m’a pas seulement été bénéfique d’un point de vue financier, il m’a changée », se souvient Aziza qui ajoute « [qu’elle se sent] plus confiante et plus autonome ».
Elle en a appris la valeur de son propre travail et sur elle-même. Elle sait maintenant qu’elle peut se plier aux contraintes d’un véritable emploi du temps. « C’était mon premier emploi. Un vrai travail avec un salaire et un emploi du temps », raconte-t-elle, rayonnante de fierté.
Pour Aziza, cet emploi lui a ouvert les yeux sur sa valeur en tant que travailleuse. « J’ai travaillé avec acharnement pendant quatre ans pour obtenir mon diplôme et j’aimerais travailler dans ce domaine… Je veux avoir ma propre carrière dans mon domaine d’études et occuper un poste permanent ».
Dirigés par le ministère jordanien du développement social, ONU Femmes et l’Union européenne, les centres Oasis aident les femmes à gagner un revenu en les aidant à entrer sur le marché du travail et à y rester. Ils cherchent également à accroître leur participation à la prise de décision au sein du foyer et à renforcer leur autonomie.
Le désir de rendre la pareille
Il était également primordial pour Aziza d’être indépendante financièrement, elle voulait se prouver qu’elle était capable de subvenir aux besoins de sa famille et de dépenser son propre argent. « Je suis autonome à présent. Mes parents m’ont permis d’obtenir mon diplôme, ils ont payé [pour mes études] pendant toutes ces années, il me paraissait inconcevable de leur demander quoi que ce soit même si j’en avais besoin ».
Aujourd’hui, Aziza est fière de pouvoir « se donner pour les rendre la pareille ».
Tout comme Aziza, Huda a vu dans sa formation un moyen de rendre à la communauté qui l’a accueillie si chaleureusement. « Je suis convaincue que les femmes peuvent apporter leur pierre à l’édifice et que [cette formation] est bénéfique à la fois pour moi et pour les autres membres de la communauté », explique-t-elle.
« Je veux rendre service aux habitants de cette ville qui m’ont aidée et m’ont soutenue au début ».
Le Fonds régional d’affectation spéciale de l’UE en réponse à la crise syrienne, également connu sous le nom arabe « Madad » qui signifie « soutenir » ou « renforcer », place l’UE en première ligne de la réponse apportée par la communauté internationale à la crise syrienne : il contribue à répondre aux besoins critiques de 5,6 millions de réfugiés syriens, de leurs communautés d’accueil et de 6,7 millions de personnes déplacées à l’intérieur de leur pays (PDI).
Le Fonds a récolté 2,38 milliards d’euros, y compris les contributions de 21 États membres, de la Turquie et du Royaume-Uni. Ce Fonds a permis la concrétisation de 129 projets dans les secteurs concernant l’enseignement élémentaire et supérieur, les moyens de subsistance, la santé, l’eau et l’assainissement, ainsi que la protection et la cohésion sociale.
Crée en décembre 2014, le Fonds régional d’affectation spéciale de l’UE en réponse à la crise syrienne – Madad s’est officiellement terminé en décembre 2021, les projets se poursuivant jusqu’en juin 2025. La réponse de l’UE à la crise syrienne doit maintenant se poursuivre par une transition vers « l’instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale » (IVCDCI, également connu sous le nom de « Europe dans le monde »).