Une nouvelle application électronique a été mise au service des jeunes palestiniens, en rassemblant les données des diplômés et étudiants de centres de formation professionnelle, et suivant leur cursus scolaire et professionnel.
Cette application, mise en place dans le cadre d’un programme financé par l’Union européenne, est la première en son genre au Moyen orient.
Texte et photos : Rafa Mismar
A travers les centres de formation professionnelle en Palestine, les étudiants travaillent à remplir des questionnaires d’autoévaluation, qui alimentent d’informations une nouvelle application électronique, développée dans le cadre d’un projet financé par l’Union européenne, «Gouvernance pour l’employabilité en Méditerranée » (GEMM). Le programme implique les étudiants de 25 centres de formation gérés par le ministère du travail, et de toutes les spécialités, du secrétariat à l’esthétique, du dessin architectural à la ferronnerie.
Le questionnaire électronique permet au centre de formation et aux étudiants de connaître le pourcentage des diplômés au travail ou au chômage, si ils utilisent ou non les compétences professionnelles qu’ils ont acquises, comment et où. L’objectif premier est statistique, mais en même temps, il fournit un service aux étudiants en leur donnant la possibilité d’être évalués, orientés et suivis.
Adieu le papier
L’ingénieur Issa Amro, 36 ans, est responsable de la mise en œuvre du projet et a supervisé la formation des coordinateurs des centres d’enseignement et de formation professionnels, à l’utilisation du questionnaire, à la récolte des données, leur stockage et analyse, et leur envoi aux décideurs.
« L’avantage de l’application c’est qu’elle permet aux utilisateurs de consulter le niveau des stagiaires et étudiants tout au long de leurs études. Elle permet de garder le contact avec eux même après qu’ils aient quitté la formation, de les orienter sur le marché du travail, et de les aider à trouver l’emploi qui leur correspond le mieux », explique Mr. Amro.
Il ajoute que « l’application électronique aide à évaluer la formation et les stagiaires. Nous pensons atteindre à la fin du projet européen les 5000 étudiants inscrits au programme. Ce qui leur permettra d’être en contact permanent avec le centre en ligne, via des comptes qui leur sont propres et leur permettent de consulter les évaluations et instructions concernant leurs programme de formation, ainsi que les possibilités sur le marché du travail ». En 2015, 160 étudiants de différentes spécialisations ont été inscrits au centre de Hébron.
Une application facile à utiliser et des informations fiables
L’application permet de rassembler des données fiables, provenant des personnes concernées et des partenaires sociaux, ce qui conduit à dire que ces résultats sont des indicateurs du marché du travail, des postes disponibles ou des débouchés possibles pour les générations futures. Selon la formatrice Mayada Atallah (30 ans) du village Bayt’Ural-Tahte, à l’ouest de la province de Ramallah, « la culture d’évaluation est très peu présente dans la société palestinienne, nous pourrons être les pionniers dans la mise en place de bases de données inestimables, qui aideraient les jeunes à trouver des emplois, améliorer leurs compétences et leurs relations professionnelles».
Mayada Atallah y voit beaucoup d’avantages: « Les donné es qui ont été récoltées à travers une approche participative, aideraient les décideurs politiques et les formateurs, en se basant sur des données nationales fiables, précises et unifiées en matière de formation professionnelle, et amélioreraient les opportunités d’apprentissage, renforceraient les aspirations des jeunes et du marché aussi, amélioreraient les conditions de vie des jeunes palestiniens et aideraient à diminuer le taux de chômage ».
Mayada a suivi une formation pour aider les jeunes à remplir un questionnaire d’évaluation avec 25 autres collègues dans les centres de formation professionnelle en Cisjordanie. Ce questionnaire accompagne le stagiaire tout au long de l’année scolaire dans le centre.
Layla Ghonam, 19 ans, du village de Yattah à Hébron, explique : « ce formulaire m’accompagne partout et surtout au début de l’année scolaire au centre puisque nous commençons à le remplir durant le premier trimestre du programme. Durant le deuxième trimestre, nous y inscrivons nos réponses concernant nos rêves et aspirations pour l’avenir, les matières vues après 3 mois, ainsi que des réponses sur notre avenir dans le métier qu’on apprend. Durant le dernier trimestre, le formulaire nous permet de rejoindre l’institution ou l’atelier dans lequel nous travaillerons. »
Le stagiaire ou l’ étudiant est ensuite capable de gérer d’autres stagiaires et de les former afin de leur permettre de communiquer, de contacter les formateurs et d’échanger les informations. « Je voudrais aider les filles avec lesquelles je travaillerai dans le domaine de la couture à utiliser l’application afin de leur permettre de communiquer avec les centres de formation professionnelle et les formateurs et trouver ce qu’elles voudraient accomplir dans l’avenir », ajoute Layla.
La formatrice Mayada Atallah rajoute avec optimisme: « oui, nous devons les initier à une nouvelle culture qui est celle d’être toujours en contact en ligne à chaque étape de la vie d’un étudiant après son départ du centre. » Dans le même contexte, elle indique que l’application jouera un rôle dans la croissance, à travers le développement de données comparables. Ces nouveaux indicateurs serviront à connaître les besoins du marché et à élaborer des politiques adaptées aux formations professionnelles et au marché du travail palestinien.
La persévérance est la base de toute réussite
A 34 ans, Kamal Abdeen travaille comme conseiller en orientation dans le centre de formation professionnelle de Hébron sans porter attention à son handicap – la balle qui l’a transpercé il y a 20 ans ne l’a pas rendu pessimiste. Le changement est survenu quand il s’est retrouvé parmi les gagnants du prix de la Palestine pour l’excellence et la créativité en 2004.
Abdeen a été choisi afin de mettre en exécution l’application. Il oriente les étudiants après avoir pris connaissance de leurs capacités afin de les aider à choisir les domaines où ils voudront travailler plus tard, une tâche transformée par cette application électronique. L’Union européenne essaye à travers ce projet de faire de cette application le premier modèle arabe d’informations concernant les jeunes et leur soutien dans le secteur professionnel et les centres de formation.
Abdeen explique: « il n’est pas facile de convaincre les étudiants perdus, de leur avenir et quel métier ils feront dans quelques années. J’ai remarqué que les étudiants suivent les avis de leurs parents pour leur métier, et c’est là que réside l’intérêt de l’application puisqu’elle les oriente selon leurs envies, intérêts, compétences et cursus universitaire. C’est là que j’interviens afin de les orienter en utilisant l’application pour s’autoévaluer au début, puis passer à la phase transitoire puis à l’évaluation finale. Je suis très content quand ils restent en contact ».
Salem Mohamad, 17 ans, confirme. Il apprend le câblage électrique au centre de Bayt‘Ur al-Tahta, à l’ouest de la province de Ramallah. « Honnêtement, je suis généralement l’avis de ma famille en ce qui concerne mes études et mon travail puisque je ne peux pas réfléchir à ce sujet tout seul. Mais je ne sais pas réellement si le choix de mes parents concernant le câblage électrique est bon ou mauvais, et c’est là que réside l’intérêt de l’application puisqu’elle nous orientera après une certaine étape de nos études ».
Kamal Abdeen n’a aucun doute sur les avantages à tirer de la nouvelle technologie: « La société palestinienne ne dispose pas de manuels et de normes permettant de fournir les indicateurs des besoins réels du marché du travail, et les occupations des jeunes dans le secteur professionnel.
Cette application œuvre à intégrer les nouvelles technologies dans les systèmes éducatifs afin d’améliorer les résultats de l’apprentissage et de faciliter la formation de compétences techniques, ce qui pourrait aider à atteindre l’apprentissage à vie et améliorerait la gestion de l’institution puis de la société. »
Pour en savoir plus
Page web du projet GEMM http://www.etf.europa.eu/web.nsf/pages/GEMM