Les activités menées par la Mission de police de l’Union européenne pour les territoires palestiniens aident à diffuser une culture d’égalité des sexes et d’autonomisation des femmes au sein des différents services répressifs en Palestine. Grâce à une formation et à un soutien spécifiques, l’idée est d’aider les agences locales à mieux s’équiper pour gérer les atteintes aux droits des femmes et des filles.
Le travail de la police est difficile, même dans les meilleures conditions et circonstances. Dans le contexte palestinien, caractérisé par un ensemble disparate de lois et de règlements qui continue à mettre à mal l’égalité des droits accordés aux femmes dans les secteurs de la sécurité et de la justice, c’est presque mission impossible, pourrait-on croire.
Le lancement du premier Réseau des femmes de la police palestinienne, un événement historique
Pourtant, c’est avec une grande fierté que deux policières prennent la pose pour une photo quelques mois après le lancement du Réseau des femmes de la police palestinienne à Ramallah, en mai 2022. Intitulée « Façonner l’avenir des policières palestiniennes », la conférence régionale a été qualifiée d’« historique et très réussie » par les participants, à savoir 224 policières de Jordanie, de Turquie et du Bangladesh, ainsi que l’Association internationale des femmes policières, entre autres.
« Ce réseau contribuera à rendre les forces de police plus cohérentes pour répondre aux attentes de la population et avoir un impact durable. Lorsqu’il sera mis en place à l’échelle nationale en Palestine, vous pourrez interagir avec les autres réseaux de policières dans d’autres parties du monde », a déclaré la cheffe de la mission EUPOL COPPS, Nataliya Apostolova, à l’occasion du lancement du réseau.
Le soutien à la police civile palestinienne (PCP) fait partie intégrante de l’action de l’EUPOL COPPS dans les territoires palestiniens occupés, où la Mission travaille main dans la main avec des partenaires locaux et internationaux pour accroître la sécurité des citoyens en renforçant les capacités de la police, des services répressifs et du pouvoir judiciaire.
« Au fur et à mesure que les policières palestiniennes affirmeront leur position et leur leadership dans le monde de la police, elles recevront un soutien continu pour les aider, ainsi que des conseils et l’assistance de mentors », explique une conseillère qui travaille pour la Mission. Elle ajoute : « Notre travail consiste à aider les policières de la PCP à rencontrer leurs collègues du monde sur la scène internationale. »
« Plus les policières palestiniennes étendront leur réseau, plus il y aura de systèmes de soutien dans l’association », poursuit-elle.
L’importance du réseau est saluée comme étant « inévitable » par les conseillères de la Mission, qui insistent sur le fait que « les réseaux facilitent et stimulent les échanges d’expériences, de valeurs et de connaissances. Il s’agit de plateformes de dialogue qui jettent des ponts entre les pays et renferment une mine de bonnes pratiques et d’idées inspirantes pour les professionnelles. »
« Un réseau permet de partager expertise et enseignements tirés, de façon à ce que les générations futures de femmes actives dans les secteurs de la sécurité et de la justice puissent innover dans l’approche de l’égalité des sexes. »
Faire à nouveau entendre sa voix grâce à la promotion d’une approche centrée sur la victime
L’échange d’expériences est également considéré comme un outil crucial pour sensibiliser aux droits et à la sécurité des femmes en Palestine, qui porte toujours un lourd fardeau de violences domestiques et d’inégalité des sexes.
« En l’absence de loi pour lutter contre la violence domestique et à caractère sexiste, énormément de femmes subissent encore des violences à caractère sexiste. C’est vraiment un problème de taille ici », explique une conseillère qui travaille pour la Mission. Elle affirme que plus de 29 % des femmes ont déjà subi des violences domestiques et à caractère sexiste dans les territoires palestiniens occupés, une situation qui s’est empirée pendant la pandémie de COVID-19.
Quant au mariage des enfants, il stagne à 24 %.
« Malheureusement, les femmes et les filles victimes de ces crimes restent très peu enclines à les signaler ou à demander une assistance de suivi », déplore-t-elle.
EUPOL COPPS est convaincue qu’une représentation plus importante de femmes dans les institutions des secteurs de la sécurité et de la justice peut contribuer à surmonter cet obstacle. « Cela assurera une représentation plus proportionnelle des besoins, des inquiétudes et des plaintes de la société palestinienne et permettra de répondre plus efficacement aux besoins de la population », explique la conseillère, qui en profite pour souligner qu’une représentation plus équilibrée renforcera aussi la confiance des citoyennes dans leurs institutions.
C’est vrai pour les forces de police, mais aussi pour les fonctions d’avocat et de juge. Depuis que la Mission et ses partenaires internationaux ont commencé à promouvoir et à introduire des approches intégrant la dimension de genre dans le domaine de la justice, la Palestine a connu une augmentation de 31 % des condamnations d’auteurs de violences à caractère sexiste.
Parmi les actions mises en place, citons les activités de renforcement des capacités du Conseil de la magistrature grâce à la formation des juges quant à une approche plus sensible au genre, le soutien au développement de capacités et procédures spécialisées dans les violences domestiques et à caractère sexiste, avec un accent particulier sur l’augmentation des pouvoirs d’enquête confiés à la police, et la coopération dans le traitement des dossiers.
Plusieurs ateliers ont également été organisés pour renforcer la coopération policière et judiciaire dans le respect d’une approche centrée sur la victime, des principes d’un procès équitable et des enfants victimes et témoins de violences domestiques.
« Dernièrement, l’accès des femmes à la justice et à la protection a évolué pour tenir compte du sexe, ce qui limite le risque de pratiques discriminatoires et de normes nocives dans la chaîne de la justice », explique une conseillère de l’équipe Justice pénale.
Briser les tabous
EUPOL COPPS s’efforce également de mettre des canaux à la disposition des femmes et des hommes, où chacun peut parler de ses difficultés quotidiennes, notamment en matière de santé mentale.
En janvier 2023, 44 officiers de la police civile palestinienne ont participé à un atelier de deux jours sur le thème « Premiers secours en santé mentale et prévention du suicide », lors duquel ils se sont formés à mieux prendre en charge les affaires impliquant des questions de santé mentale.
« Pour les agents de l’Unité de protection de la famille et des mineurs, il est crucial de connaître les facteurs de risque courants et les signaux d’alerte des personnes suicidaires, et de savoir comment ils peuvent les aider en tant que premiers intervenants », explique un conseiller de l’équipe Police d’EUPOL COPPS.
Les participants ont également appris comment s’occuper de personnes suicidaires, de femmes et de filles traumatisées, ainsi que de personnes ayant subi un choc psychologique. « Le retour des participants a été très positif. Ils ont approfondi le sujet et ont échangé ouvertement leurs expériences, défis et difficultés avec les victimes, ainsi qu’avec d’autres collègues », se souvient le conseiller.
On réfléchit déjà à élaborer d’autres programmes de formation sur la santé mentale, dans le but de développer l’aptitude des agents de l’Unité à donner des formations en interne. Par cette approche de formation des formateurs, les représentants d’EUPOL COPPS insistent sur l’importance des avancées durables dans la protection des droits de l’homme, profondément ancrés dans l’appropriation locale. Toutes les activités d’EUPOL COPPS intègrent l’approche fondée sur les droits de l’homme ainsi que l’appropriation locale, qui restent le fil rouge tout au long de la mise en œuvre du mandat.
« Nous avons par exemple veillé à ce que cette formation sur la santé mentale s’accompagne d’un processus d’évaluation visant à en garantir la durabilité. L’idée n’est pas que ce soit un événement unique, mais plutôt la première étape d’un long parcours couronné de succès », conclut le conseiller.
Créée en 2006, EUPOL COPPS est la Mission de police de l’Union européenne pour les territoires palestiniens.
Elle a pour objectif d’accroître la sécurité de la population palestinienne. Elle s’inscrit dans le cadre des efforts plus larges déployés par l’UE en faveur de la création d’un État palestinien, afin de parvenir à une paix globale fondée sur la coexistence de deux États.
Plus spécifiquement, la Mission vise à soutenir la réforme et le développement de la police civile palestinienne, à renforcer et à soutenir le système de justice pénale, à améliorer la coopération policière et judiciaire, et à coordonner l’aide des donateurs extérieurs en faveur de la police civile palestinienne.