Un exemple d’autonomisation : triomphe de la plombière jordanienne Sana grâce à l’UDE-Syrie

Janvier 17, 2024
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Au cœur du district de Ramtha, dans le gouvernorat d’Irbid (Jordanie), Sana Wardate mène une révolution pour la vie des femmes. Avec ses cheveux noirs de jais et son esprit aussi tenace que les pierres anciennes de son pays, Sana se fait remarquer. En effet, non seulement elle est la seule femme plombier de la région, mais elle se démarque aussi en raison du parcours qui l’a menée jusqu’ici. À trente ans, elle est le principal soutien de famille et porte sur ses épaules le poids des espoirs de toute une famille.

Traditionnellement, le rythme du cliquetis des canalisations et l’art de la plomberie étaient l’apanage des hommes. Pourtant, pour Sana, ces sons sont devenus la symphonie du changement. Il y a quelques mois, elle a entamé une nouvelle carrière de plombière grâce à l’initiative de l’Union européenne, EDU Syrie. Ce programme lui a permis d’accéder à un enseignement et une formation techniques et professionnels (EFTP). Mais pour Sana, il ne s’agissait pas simplement d’une chance d’acquérir une nouvelle compétence, elle y a vu l’occasion de changer son destin.

Grâce à la formation, Sana n’a pas seulement appris la plomberie. Elle a également acquis des compétences en comptabilité pour aider sa famille à surmonter l’incertitude financière. « Cette formation a changé ma vie. Mon mari est travailleur journalier et il peut rester des jours sans travail. Il nous est arrivé de n’avoir rien à manger à la maison. Aujourd’hui, tout a changé. J’étais une personne timide et renfermée. Cette formation, et le travail que je fais depuis, m’ont apporté énormément de confiance en moi », déclare-t-elle, sa voix traduisant la gratitude d’une existence transformée.

Les temps sont révolus où la famille de Sana restait assise avec des assiettes vides, attendant que leur destin change. Aujourd’hui, grâce à ses nouvelles compétences, elle fait figure de pourvoyeuse et de pilier. « Ma famille sait qu’elle peut compter sur moi », sourit-elle, ses yeux témoignant d’un profond sentiment de confiance qu’elle ignorait jusqu’alors.

De nombreuses femmes, contraintes par les normes sociétales, hésitent à inviter des plombiers masculins chez elles. Consciente de cette situation, Sana est devenue leur solution. Elle a construit des ponts, et non des murs, se créant une clientèle fidèle de femmes qui la considèrent non seulement comme une plombière, mais aussi comme une alliée de confiance. « Je sais qu’il y a un marché important pour les femmes plombiers dans la région », confie-t-elle.

Sa réputation ? Impeccable. Les grossistes, autrefois étrangers, l’accueillent aujourd’hui avec respect, lui proposant des offres et des prix qui en disent long sur son influence. « Ils me font de très bons prix depuis qu’ils me connaissent », s’amuse-t-elle.

Mais les rêves de Sana ne s’arrêtent pas là. Avec ses outils en main et des rêves plein la tête, elle aspire à créer sa propre entreprise ; un havre où les femmes, comme elle, pourront brandir la clé de l’indépendance.

EFTP pour les femmes : catalyseur de l’inclusion et la croissance économique

L’Union européenne et les membres du consortium EDU Syrie reconnaissent le rôle essentiel de l’autonomisation des femmes dans les secteurs traditionnellement dominés par les hommes. Ce souci d’inclusion s’inscrit dans une vision plus large de promotion de l’égalité des sexes et d’autonomisation des femmes.

Pour lutter véritablement en faveur de l’égalité des sexes, il est essentiel de démanteler les vieux stéréotypes qui cantonnent les femmes à des rôles et des professions spécifiques. En proposant un enseignement et une formation techniques et professionnels (EFTP) adaptés aux femmes dans des secteurs traditionnellement dominés par les hommes, nous permettons non seulement aux femmes de développer leurs compétences, mais nous remettons également en question les normes sociétales. De telles initiatives ouvrent la voie à une société où les opportunités ne sont pas limitées par le sexe.

De plus, lorsque les femmes participent activement à la main-d’œuvre, elles agissent comme un catalyseur de la croissance économique. Leur participation plus active favorise l’autonomie financière, réduit la pauvreté au sein des ménages et améliore le paysage économique dans son ensemble.

De plus, l’intégration des femmes dans des secteurs où elles sont sous-représentées enrichit la diversité globale des compétences de la main-d’œuvre. Cette réserve de talents alimente à son tour l’innovation, la productivité et la capacité à résoudre les problèmes au sein de ces industries. Dans les régions confrontées à une pénurie de professionnels qualifiés, le fait de doter les femmes de la formation nécessaire peut combler le fossé et insuffler de la vitalité à la main-d’œuvre.

Un pont entre les communautés : les communautés d’accueil jordaniennes et les réfugiés soutenus par EDU-Syrie

Wieke Waterschoot, responsable du programme Education – Refugee Response à la délégation de l’UE en Jordanie, souligne l’importance d’inclure les communautés d’accueil dans les programmes destinés initialement aux réfugiés.  « C’est extrêmement important pour plusieurs raisons, notamment le partage des connaissances et de l’expérience, la promotion de la cohésion sociale, le développement durable et l’amélioration de l’intégration économique”, explique-t-elle.

En effet, la communauté d’accueil, avec ses vastes expériences culturelles et professionnelles, ainsi que sa compréhension du contexte socio-économique local, peut grandement bénéficier aux réfugiés. Elle peut leur apporter des connaissances pratiques et des conseils inestimables, et combler d’éventuels fossés culturels. L’inclusion de la communauté d’accueil permet une meilleure compréhension et réduit le risque de frictions et de sentiments d’aliénation. Les réfugiés peuvent ainsi être guidés, ce qui permet de combler les fossés culturels et de favoriser la compréhension mutuelle. Cette inclusion diminue les conflits potentiels et cultive un sentiment d’unité et de résilience partagée au sein de la communauté.

« L’implication de la communauté d’accueil garantit la compatibilité des initiatives avec d’autres projets de développement régional en cours. Cette approche garantit que les efforts déployés pour soutenir les réfugiés syriens contribueront également à la croissance et au développement globaux de la région, sans pour autant négliger la communauté d’accueil. La communauté d’accueil peut jouer un rôle crucial dans l’intégration des réfugiés dans l’économie locale. Elle peut aider à établir des liens avec le marché et promouvoir une croissance économique mutuelle”, ajoute Wieke.

Dans le cadre de l’initiative EDU-Syrie, de nombreux projets d’EFTP ont été lancés depuis 2015, dont plusieurs se poursuivent jusqu’en 2028. En collaboration avec le Luminus Technical University College (LTUC) de Jordanie, ces programmes ont permis à plus d’un millier de personnes d’acquérir de nouvelles compétences et de bénéficier de nouvelles sources de revenus. Jusqu’à présent, plus d’un millier de personnes ont bénéficié de ces formations qui leur ont permis d’apprendre de nouveaux métiers et de percevoir des revenus. Le nombre de bénéficiaires devrait dépasser les prévisions.

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