Le vent d’Egypte, une énergie propre

Août 15, 2018
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L’Union Européenne dispense une aide de 30 millions d’Euros au parc éolien de Gabal El-Zayt, en Egypte, dont le coût total est de 340 millions d’Euros. Plusieurs donneurs européens participent également à cet ambitieux projet de la Mer Rouge, dont entre autres la Banque allemande pour le développement, et ce afin de produire une énergie propre. 

Dans la zone de Gabal El-Zayt, à quelques 350 km du Caire en direction d’Hurghada, on peut littéralement gagner de l’argent, avec du vent. Située entre le Golfe de Suez et les montagnes de la Mer Rouge, la topographie des lieux fait souffler le vent en moyenne à 10,5 mètres par seconde, soit un taux plus élevé que la ville voisine de Zaafarana, au bord de la Mer Rouge, où la vitesse du vent est d’environ 8,5 mètres par seconde. De toute évidence, l’Egypte a un fort potentiel en matière d’énergie éolienne. Elle tente donc d’accélérer sa conversion à cette énergie propre, en construisant des parcs éoliens tout au long de la Mer Rouge orientale.

Le pays, producteur de gaz, s’est longtemps reposé sur les énergies fossiles, mais il a commencé à partir des années 1990 à se tourner vers la force du vent pour produire de l’électricité verte. C’est le cas notamment du parc éolien de Gabal El-Zayt, cofinancé par l’Union Européenne, la Banque allemande pour le développement (KFW) et la Banque européenne d’investissement (BEI), en collaboration avec le gouvernement égyptien. Ce parc, qui s’étend sur 43 km2, fait partie de tout un complexe éolien de 600 km2 ; il est censé réduire les émissions de CO2 pour atteindre 400.000 tonnes par an, de quoi constituer une zone idéale pour les investissements énergétiques.

Deux MW par turbine

Sur l’étendue de sable, se dressent les 120 turbines de ce que l’on s’accorde à appeler, sur le terrain, le projet du KFW. Ce dernier établissement bancaire est celui qui supervise essentiellement les travaux et coordonne les divers partenaires.

Les ingénieurs et responsables du bon déroulement du projet sont enchantés que les turbines de la nouvelle phase d’extension du projet soient devenues opérationnelles: « Elles vont nous donner un peu d’air, après tant de fatigue ! », se réjouissent-t-ils. De toute façon, en dépit du soleil qui tape fort et de la température relativement élevée, il y a plus de vent l’été que l’hiver.

Les ingénieurs et techniciens ont même cultivé un petit potager. Ils y ont planté, en plein désert, des fèves, des olives, des pastèques et de la menthe, juste devant leurs logements. C’est leur passe-temps préféré!

Concrètement, plusieurs nationalités se mêlent sur le chantier qui regroupe, outre les Égyptiens, des experts temporaires marocains, algériens, espagnols, indiens et turcs. « Les bédouins et les locaux nous aident à maintenir la sécurité du site et le reste de l’effectif vient des quatre coins de l’Egypte. Nous dépendons de l’Agence égyptienne de l’énergie renouvelable (NREA) », précise l’ingénieur Akmal Mohamed, responsable du fonctionnement du site, sur place depuis 2014.
Comme la plupart du personnel, Mohamed était auparavant en poste dans le parc de Zaafarana. C’est ainsi qu’avec ses collègues, il compare souvent les deux sites. « Les 120 turbines d’ici sont beaucoup plus modernes et puissantes. Elles fournissent dans l’ensemble 240 Mégas Watts.» explique l’ingénieur Mahmoud Hamed Abdel-Hamid, directeur de l’extension du projet KFW. En se promenant sur les chemins battus, il montre les gisements pétroliers à droite des éoliennes, tout au long de la route.

Tout le projet de Gabal El-Zayt produit 580 MW, chaque turbine produisant 2000 kilos d’électricité contre 850 kilos par turbine à Zaafarana. Chaque turbine est nettoyée tous les deux ans et entretenue tous les six mois.

Le radar des aigles noirs

Rien ne peut troubler le calme des lieux, sauf le cri strident d’un oiseau rapace tout comme cet aigle noir survolant les pales d’éoliennes. Elles sont marquées par trois traits rouges pour aviser les oiseaux, puisque le parc se situe sur le trajet migratoire de nombreuses espèces d’oiseaux. Pour éviter que ceux-ci ne soient exposés au danger, un système spécial de radar a été mis en place, en coopération entre l’armée égyptienne et une société portugaise.

Les observateurs et les surveillants sont présents tous les jours sur le site, et collaborent avec les ornithologues du ministère de l’environnement qui sillonnent eux aussi l’endroit, du matin au soir. On les retrouve scrutant une nuée de cigognes blanches avec leur jumelle, comptant le nombre d’oiseaux migrateurs ou calculant l’altitude de la volée. « Au cas où il y aurait un danger menaçant la vie des oiseaux, le radar le détecte, en donnant des précisions. Parfois, on est contraint d’éteindre les turbines en moins d’une minute, pour éviter le carnage. Ce système de radar est d’usage depuis le printemps dernier », indique Mahmoud Hamed Abdel-Hamid. Les oiseaux sont également devenus un passe-temps des experts : Mahmoud ainsi que ses collègues apprécient les discussions enrichissantes avec les ornithologues qui ont d’ailleurs souvent le guide des oiseaux Collins Bird en main ou téléchargé sur leurs téléphones portables.
Parfois un milan noir ou un faucon traverse le ciel, et des fois ce sont des centaines ou des milliers d’oiseaux qui le traversent. C’est ainsi que les ingénieurs s’amusent à les discerner et les reconnaître, accompagnés de l’expert technique allemand, Wesly Urena Vargas, en visite au moins deux ou trois fois par an. Ce dernier, embauché par KFW, leur a souvent prêté main forte pour surmonter les difficultés en lien avec les conditions climatiques du désert, tels que le sable ou la rosée.

Du côté de la délégation européenne au Caire, Ahmed El-Beltagui, directeur du programme portant sur les projets d’énergie et de transport, confirme que ce projet sera suivi d’un autre similaire, cette fois-ci en collaboration avec l’Agence française du développement (AFD) : « La formule est toujours la même. L’UE octroie une aide de 30 millions d’Euros pour un projet d’un coût total de 340 millions d’Euros. Cette participation au financement facilite l’obtention de prêts alloués par le Fonds d’Investissement de proximité. De même, le montant versé par l’UE réduit le taux d’intérêt que doit verser l’Egypte ». Miguel Arias Canete, commissaire européen chargé de l’énergie et du climat, en visite au Caire du 22 au 24 mars 2018, a signé avec les autorités égyptiennes un mémorandum d’entente concernant le partenariat stratégique entre l’Egypte et l’UE en matière d’énergie. Des projets sont, à ce titre, encore sur les rails. L’Egypte, riche en gaz naturel et en ressources d’énergie renouvelable, se prépare, d’ores et déjà, à devenir un corridor d’énergie, entre le Moyen Orient et l’Europe.
 

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